Article scientifique

Sport et Radicalisation

Publié le 16/05/2025 par Vigie de la Laïcité
Avec Daniel Verba

Publié le 16/05/2025
Par Vigie de la Laïcité
Avec Daniel Verba

L’un des principaux arguments des sénateurs qui ont porté la proposition de loi visant à interdire le port de signes religieux dans les compétitons sportives, était de lutter contre le séparatisme entendu comme une volonté délibérée de rompre avec les valeurs républicaines, mais aussi de lutter contre la radicalisation avec le postulat du continuum porté par tous les courants réactionnaires actuels : Islam = communautarisme = séparatisme = radicalisation.
Or un rapport publié en 2022 par L’Institut des hautes études du ministère de l’Intérieur échoue à montrer un phénomène structurel ni même significatif de communautarisme ou de radicalisation dans le sport. Le rapport permet de poser des hypothèses à partir des deux questions suivantes :

  1. Quelle radicalisation dans quels sports ?
  2. Quel rôle du sport dans la radicalisation ?

A ces deux questions, le rapport répond sans ambiguïtés :

  1. Les clubs de sports ou les associations sportives ne sont pas de dangereux repaires de salafistes ou de frères musulmans ayant pour projet le démantèlement de notre République.
    Par ailleurs, les quelques sports où l’on observe en effet des formes embryonnaires de communautarisme sont les sports de la forme (musculation, fitness…), les sports de combat et le futsal ; le football, et le tir sont moins touchés que prévu.
  2. Loin de participer à la socialisation de l’engagement radical, le sport semble au contraire en protéger, en raison des valeurs qu’il véhicule et de l’encadrement qu’il suppose en général. Il s’avère en effet que les 153 personnes radicalisées de l’enquête sont moins sportives que la population générale et que les chercheurs n’ont pu identifier que 17 associations sur 100 000 qui étaient affectées par le communautarisme.

Le rapport ne nie pas l’augmentation significative du fait religieux musulman dans le sport. Le sport n’est en effet que le reflet des évolutions de notre société où l’islam est devenu la deuxième religion en terme de nombre. Il note aussi que celui-ci peut être parfois associé à des problèmes de sexisme, de pression collective ou de repli identitaire, notamment lorsque la pratique religieuse s’invite dans les vestiaires ou que les encadrants se transforment en entrepreneurs de morale religieuse. Par exemple, il ne serait pas admissible que l’on doive porter obligatoirement un voile pour intégrer une équipe… Mais le rapport pointe aussi que les violences sexuelles sont un problème bien plus prégnant dans le sport associatif que le séparatisme ou la radicalisation et que celles-ci ne sont pas l’apanage des populations de culture musulmane. En bref, que les sénateurs seraient parfois bien inspirés de s’emparer des problèmes systémiques de notre société comme les discriminations ou les violences sexuelles, plutôt que de concentrer leurs efforts sur des pratiques qui, très marginales, relèvent souvent de comportements locaux, et n’ont pas d’incidence sur l’ensemble du mouvement sportif qui très majoritairement reste attaché à la neutralité religieuse.

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